Cour d'appel
Monaco
18 octobre 2018
Monsieur t. SU. en présence du Ministère public
Contentieux Judiciaire
Abstract
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Extradition - Demande de détention provisoire - Transmission du mandat d'arrêt - Conditions remplies (non) - Ordonnance de placement en détention provisoire - Infirmation (oui) |
Résumé
En l'espèce, les autorités polonaises ont transmis aux autorités de la Principauté de Monaco une demande d'arrestation provisoire de Monsieur t. SU en vue de son extradition, qui s'inscrit dans le cadre des dispositions de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 et de la
Loi n° 1.222 du 28 décembre 1999
.
Aux termes de l'article 16-4 de cette Convention, l'arrestation provisoire devra prendre fin si dans le délai de 40 jours après l'arrestation, la partie requise n'a pas été saisie de la demande d'extradition et des pièces mentionnées à l'article 12.
Ce délai maximal de 40 jours est donc imposé à l'État requérant pour communiquer sa demande d'extradition comprenant de façon définitive l'ensemble des pièces requises.
Il convient de souligner que le maintien en détention suppose que l'autorité requérante ait, dans le délai de 40 jours prévu à cet effet, communiqué à l'État requis non seulement la demande d'extradition, mais également toutes les pièces visées à l'article 12 précité. Ainsi, passé ce délai, il n'est plus possible, au regard de l'article 16-4 précité, de détenir provisoirement un individu potentiellement extradable, sans préjudice toutefois d'une nouvelle arrestation si la demande d'extradition parvient ultérieurement selon l'article 16-5 de la Convention européenne d'extradition.
En l'espèce, les autorités polonaises ont, le 17 septembre 2018, fait parvenir aux autorités monégasques la demande d'extradition qui était incomplète au sens de la Convention, les pièces transmises n'étant ni des expéditions authentiques ni des originaux, ainsi que l'a retenu la Cour d'appel dans son arrêt du 11 octobre 2018.
De plus, elles n'ont pas avant le 1er octobre 2018, date à laquelle le délai a expiré, utilement complété leur demande, l'original du mandat d'arrêt du 1er février 2018 n'étant parvenu à la Direction des services judiciaires que le 3 octobre 2018 suivant.
Il est important de relever que la transmission du mandat d'arrêt ne s'apparente pas à une demande d'extradition accompagnée des pièces visées par la Convention précitée en sorte qu'une nouvelle arrestation n'est en conséquence pas permise.
Ainsi et dans ces conditions, Monsieur t. SU ne pouvait pas en l'état être interpellé à sa sortie de la maison d'arrêt le 11 octobre 2018 pour être placé à nouveau en détention provisoire.
En conséquence d'infirmer l'ordonnance de placement en détention provisoire rendue par le Juge d'instruction le 12 octobre 2018 et d'ordonner la remise en liberté immédiate de Monsieur t. SU.
Chambre du Conseil
La Cour
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
La Chambre du conseil statue sur les appels interjetés le 15 octobre 2018 par Maître Stephan PASTOR, avocat-stagiaire, et le 16 octobre 2018 par télécopie, formalisé le 17 octobre 2018 sur le registre ad hoc par t. SU. détenu, en personne, à l'encontre de l'ordonnance de placement en détention provisoire rendue le 12 octobre 2018 par le magistrat instructeur.
Considérant les faits suivants :
Le 22 août 2018 à 12 h 20, un équipage de la Sûreté publique était dépêché au sein de l'établissement « NI BOX » à Monaco à la suite d'un différend survenu entre une serveuse et un client.
cette occasion, t. SU. faisait l'objet d'un contrôle de son identité. Il était aussitôt interpellé à la suite de l'émission le 25 avril 2018 par le Bureau Central National de Varsovie (Pologne) d'une fiche Interpol, sous le n° 2018/37646-1, concernant le nommé t. SU. né le 26 juillet 1976 à Rawicz, aux termes de laquelle était sollicitée son arrestation en exécution d'un mandat d'arrêt européen délivré le 22 mars 2018 sous le n° II KOP 27/18 par la Circuit Court of ZIELONA GORA, suite à une condamnation rendue le 21 octobre 2015 par cette juridiction sous le n° II K 216/14 à la peine de 18 mois d'emprisonnement pour des faits de menaces et vol aggravé.
Le 22 août 2018 à 16 heures et 9 minutes, le BCN Interpol Varsovie confirmait la validité du mandat d'arrêt délivré le 22 mars 2018 par la Circuit Court of ZIELONA GORA.
Sur réquisitions du Procureur général en date du 23 août 2018, t. SU. était présenté le même jour au Juge d'instruction.
Aux termes de cette audition, t. SU. ressortissant polonais, a reconnu que la fiche Interpol numérotée 2018/37646-1 et le mandat d'arrêt du 22 mars 2018 s'appliquaient bien à lui. Il indiquait avoir été condamné en France et être en train d'exécuter plusieurs peines d'emprisonnement prononcées en France, ceci sous le régime du placement sous surveillance électronique.
Ce magistrat a procédé aux formalités prescrites à l'
article de la Loi n° 1.222 du 28 décembre 1999
et l'a placé en détention provisoire en décernant mandat d'arrêt à son encontre en l'absence de toute garantie de représentation.
L'ordonnance de placement du 23 août 2018 a été confirmée par la Cour d'appel par arrêt rendu le 28 août 2018.
Le 17 septembre 2018, le Procureur général a communiqué au Juge d'instruction la demande d'extradition et les pièces produites par les autorités concernant t. SU. Cette communication a été complétée le 27 septembre suivant par la copie du mandat d'arrêt délivré à l'encontre de t. SU.
Suivant procès-verbal de notification de demande d'extradition du 1er octobre 2018, le Juge d'instruction a notifié à t. SU. la copie de la fiche Interpol émise par le BCN VARSOVIE (Pologne) numérotée 2018/37645 (affaire n° 2018/37646-1) émise le 25 avril 2018, mise à jour le 26 avril 2018 sollicitant l'arrestation de t. SU. et la copie du mandat d'arrêt européen n° II KOP 27/18 délivré le 22 mars 2018 par la Cour de justice de ZIELONA GORA (Pologne) pour des faits de menaces et vol aggravé ordonnant l'exécution de la condamnation pénale n° II K 216/14 de 1 an et 6 mois d'emprisonnement rendue le 21 octobre 2015 par la même Cour de justice de ZIELONA GORA (Pologne).
Par
ordonnance du 1er octobre 2018
, jour de l'expiration du délai de 40 jours pour faire parvenir la demande d'arrestation, le Juge d'instruction constatant l'absence de réception des pièces originales de la demande d'extradition a mis d'office en liberté de t. SU.
L'original du mandat d'arrêt original n° II 2 Ko 38/18 en date du 1er février 2018 délivré par le Tribunal régional de ZIELONA GORA (Pologne) est parvenu à la Direction des services judiciaires le 3 octobre 2018.
L'
ordonnance du 1er octobre 2018
ayant été confirmée par la Cour d'appel par arrêt rendu le 11 octobre 2018, t. SU. a le même jour été remis en liberté, mais a été interpellé à sa sortie de la maison d'arrêt de Monaco sur ordre d'arrestation n°24-EXT-2018 délivré par le Procureur par suite de la réception du mandat d'arrêt original n° II 2 Ko 38/18 en date du 1er février 2018 délivré par le Tribunal régional de ZIELONA GORA (Pologne).
Présenté le lendemain au Juge d'instruction, ce magistrat lui a suivant procès-verbal d'interrogatoire d'identité notifié les documents fondant la demande d'extradition, conformément à l'
article de la Loi n° 1.222 du 28 décembre 1999
et l'a placé en détention provisoire, suivant mandat d'arrêt du 12 octobre 2018, afin de garantir de façon effective la représentation de l'intéressé.
Pour statuer ainsi au visa des
articles 180 et 191 du Code de procédure pénale
, le magistrat instructeur a considéré qu'en l'état de l'absence de toute garantie de représentation, du quantum de la peine à exécuter et de l'impossibilité de déterminer les capacités financières de t. SU. pour fixer un cautionnement, les obligations envisageables au titre d'un placement sous contrôle judiciaire paraissaient insuffisantes à titre de mesure de sûreté.
Le 17 octobre 2018, t. SU. a interjeté appel de cette ordonnance.
Le 17 octobre 2018, le Ministère public a fait des réquisitions écrites aux fins de confirmation de l'ordonnance entreprise.
l'audience de la Chambre du conseil de la Cour d'appel fixée pour l'examen de l'affaire, le Procureur général a sollicité la confirmation de l'ordonnance du Juge d'instruction en application des dispositions de l'
article , alinéa 4 de la Loi n°1.222
en l'état de la nouvelle demande postérieure à la remise en liberté.
Le conseil de t. SU. a demandé à la Cour d'appel de :
- juger que le mandat d'arrêt ne constitue pas une nouvelle demande d'extradition au sens de la Loi et de la Convention européenne d'extradition,
- juger que t. SU. a fait l'objet d'une arrestation illégale et arbitraire,
- ordonner la remise en liberté d'office et immédiate.
Il fait valoir à cet effet que la nouvelle arrestation est déloyale et arbitraire dès lors que le nouveau mandat d'arrêt était parvenu antérieurement à la décision de remise en liberté et que le procédé mis en €uvre aboutit à faire proroger le délai à chaque communication d'une nouvelle pièce.
t. SU. a été entendu en dernier en ses observations.
S UR CE,
Attendu que la recevabilité de l'appel de l'ordonnance du juge d'instruction n'est pas discutée ;
Attendu que les autorités polonaises ont transmis aux autorités de la Principauté une demande d'arrestation provisoire de t. SU. en vue de son extradition, qui s'inscrit dans le cadre des dispositions de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 et de la
Loi n° 1.222 du 28 décembre 1999
;
Attendu qu'aux termes de l'article 16-4 de cette Convention, l'arrestation provisoire devra prendre fin si dans le délai de 40 jours après l'arrestation, la Partie requise n'a pas été saisie de la demande d'extradition et des pièces mentionnées à l'article 12 ;
Qu'un délai maximal de 40 jours est donc imposé à l'État requérant pour communiquer sa demande d'extradition comprenant de façon définitive l'ensemble des pièces requises ;
Qu'ainsi le maintien en détention suppose que l'autorité requérante ait, dans le délai de 40 jours prévu à cet effet, communiqué à l'État requis non seulement la demande d'extradition, mais également toutes les pièces visées à l'article 12 précité ;
Qu'à défaut, passé ce délai, il n'est plus possible, au regard de l'article 16-4 précité, de détenir provisoirement un individu potentiellement extradable, sans préjudice toutefois d'une nouvelle arrestation si la demande d'extradition parvient ultérieurement selon l'article 16-5 de la Convention européenne d'extradition ;
Attendu, en l'espèce, que les autorités polonaises ont, le 17 septembre 2018, fait parvenir aux autorités monégasques la demande d'extradition qui était incomplète au sens de la Convention, les pièces transmises n'étant ni des expéditions authentiques ni des originaux, ainsi que l'a retenu la Cour d'appel dans son arrêt du 11 octobre 2018 ;
Qu'elles n'ont pas avant le 1er octobre 2018, date à laquelle le délai a expiré, utilement complété leur demande, l'original du mandat d'arrêt du 1er février 2018 n'étant parvenu à la Direction des services judiciaires que le 3 octobre 2018 suivant ;
Que la transmission du mandat d'arrêt ne s'apparente pas à une demande d'extradition accompagnée des pièces visées par la Convention précitée en sorte qu'une nouvelle arrestation n'est en conséquence pas permise ;
Attendu que dans ces conditions, t. SU. ne pouvait pas en l'état être interpellé à sa sortie de la maison d'arrêt le 11 octobre 2018 pour être placé à nouveau en détention provisoire ;
Attendu qu'il convient en conséquence d'infirmer l'ordonnance de placement en détention provisoire rendue par le Juge d'instruction le 12 octobre 2018 et d'ordonner la remise en liberté immédiate de t. SU. ;
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DU CONSEIL DE LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
Reçoit t. SU. en son appel,
Infirme l'ordonnance rendue par le Juge d'instruction le 12 octobre 2018,
Ordonne la remise en liberté immédiate de t. SU. ;
Laisse les frais à la charge du Trésor public.
Contentieux Judiciaire