c/ H.
Si la juridiction monégasque n'est pas compétente pour se prononcer sur la régularité de la garde à vue de M. H. au regard de la loi française comme le soutiennent exactement Mme R. M. B. ainsi que le ministère public, ce dernier fait observer à juste titre qu'il appartient à la chambre du conseil d'apprécier cette régularité au regard des droits de la défense et des principes généraux du droit comme cela lui est demandé par M. H.
Qu'à cet égard, le dossier de la procédure permet à la cour de renvoi de s'assurer que ce dernier s'est vu notifier, dès son placement en garde à vue, toutes les mesures protectrices des droits de la défense tels que déterminées par les standards monégasques et internationaux et spécialement par l'article 6 de la CESDH ; que lui ont été notifiés notamment les faits pour lesquels il était placé en garde à vue, le droit de garder le silence, d'être assisté d'un avocat, de prévenir un membre de sa famille et d'être examiné par un médecin les conditions dans lesquelles la prolongation de sa garde à vue a été ordonnée ne portent pas atteinte aux droits de la défense et ne violent pas l'article 19 de la Constitution monégasque dès lors que cette décision, qui est motivée et soumise à un contrôle juridictionnel, a été prise en toute indépendance par un magistrat du siège habilité à cette fin et que la présentation préalable du gardé à vue à ce magistrat n'a pu être effectuée en raison de l'éloignement géographique du juge d'instruction parisien chargé de ce contrôle, compétent par rapport au lieu de la garde à vue.
Que, sur le second point, le fait que la garde à vue de M. H. n'ait pas fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel en raison de circonstances exceptionnelles provenant du dysfonctionnement du système de visioconférence des services locaux de police n'est contraire ni aux principes généraux du droit, ni au respect des droits de la défense dès lors que M. H. a été assisté de son conseil au cours de sa garde à vue et que ce dernier n'a émis de critique ni sur le comportement des enquêteurs au cours de cette garde à vue, ni sur l'exactitude de la retranscription des interrogatoires et ne fait état d'aucune contestation de ce chef dans le mémoire déposé à l'appui de sa requête.
Attendu dès lors que la demande de nullité de la garde à vue de M. H. et de sa prolongation sera rejetée.
Mais attendu qu'aucune disposition légale n'interdit au juge d'instruction qui, aux termes de l'
article 87 du Code de procédure pénale
prend toutes les mesures qu'il estime utile à la manifestation de la vérité, lorsqu'il est chargé de deux informations distinctes, de joindre à l'une des procédures des éléments provenant de l'autre, dont la production est de nature à contribuer à la manifestation de la vérité, dans la mesure où, comme c'est le cas en l'espèce, ces éléments sont soumis à la discussion des parties.
M. H. ne rapporte pas la preuve qu'il ait été porté atteinte à ses droits, dès lors qu'il n'a fait aucune déclaration au cours de sa première comparution si ce n'est une déclaration de principe d'ordre général qui n'est pas de nature à l'incriminer et que, lors de sa garde à vue au cours de laquelle il a été interrogé en détail sur les faits pouvant lui être imputés, ainsi qu'à l'occasion des actes d'instruction qui ont suivi son inculpation, il a été assisté par un avocat avec lequel il a pu librement s'entretenir et qui a eu accès au dossier de l'information conformément à la loi.
en session -Chambre du conseil
La Cour,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Il résulte des pièces de la procédure que, le 19 septembre 2017, le procureur général de Monaco ouvrait une information judiciaire contre « X » des chefs de trafic d'influence actif, trafic d'influence passif et de complicité de ces délits pour la période allant de courant 2013 à courant 2017.
Cette information judiciaire faisait suite à une autre information ouverte le 30 juin 2015 (CAB2 2015/20) sur plainte avec constitution de partie civile de Mme t. B. épouse R. à l'encontre de M. d. R. et de Mme t. B. son avocate, des chefs d'atteinte à la vie privée, complicité et recel.
Mme R. exposait à l'appui de sa plainte que le 17 avril 2015, Mme B. avait fait parvenir par courriel à un enquêteur de la Sûreté publique un enregistrement audio, que cette dernière avait réalisé à son insu sur son téléphone portable le 23 février 2015 au cours d'un dîner qui s'était tenu à Monaco au domicile de M. R.
Elle indiquait que cet enregistrement avait été adressé aux services de police afin de servir de preuve pour les besoins d'une autre information judiciaire (CAB1 2015/04) ouverte sur plainte des sociétés appartenant à M. R. ou à sa famille pour escroquerie et complicité d'escroquerie, abus de confiance et complicité d'abus de confiance et blanchiment du produit d'une infraction la mettant en cause ainsi que M. y. B.
Elle précisait que, lors de cette information, M. B. et elle-même avaient été inculpés et placés sous contrôle judiciaire en février 2015.
Dans le cadre de l'information judiciaire ouverte des chefs d'atteinte à la vie privée, complicité et recel, Mme B. remettait aux enquêteurs le téléphone portable sur lequel se trouvait l'enregistrement effectué au cours de ce dîner.
L'expertise de ce téléphone ordonnée par le magistrat instructeur révélait, outre la présence de l'enregistrement visé par la plainte, l'existence de messages échangés entre d'une part Mme B. et d'autre part plusieurs membres de la Direction de la Sûreté publique parmi lesquels M. c. H. commissaire principal de police, ainsi que des autorités judiciaires de la Principauté.
Le 26 septembre 2017, Mme R. déposait plainte avec constitution de partie civile contre « X » des chefs de violation du secret de l'enquête et du secret de l'instruction et complicité, recel de violation du secret de l'enquête et du secret de l'instruction et complicité, corruption active et corruption passive et complicité, trafic d'influence actif et trafic d'influence passif et complicité.
Le 9 octobre 2017, le procureur général délivrait des réquisitions aux fins d'informer contre « X » de ces mêmes chefs.
Le 25 octobre 2017, M. B. déposait plainte avec constitution de partie civile contre « X » des chefs de faux en écritures publiques et usage, corruption active et corruption passive, trafic d'influence actif et trafic d'influence passif, blanchiment du produit d'une infraction et recel du produit d'une infraction ainsi que complicité de ces crimes et délits.
Le 13 novembre 2017, le procureur général délivrait des réquisitions aux fins d'informer contre « X » des chefs de faux en écritures publiques et usage et complicité, corruption active et corruption passive et complicité, trafic d'influence actif et passif et complicité, blanchiment du produit d'une infraction et complicité ainsi que de recel du produit d'une infraction et complicité
Par ailleurs, le 11 décembre 2017, le procureur général rédigeait un réquisitoire supplétif contre « X » des chefs de recel de trafic d'influence actif et passif et de recel de corruption active et passive, tandis que le 28 juin 2018, celui-ci étendait à nouveau la saisine originelle du magistrat instructeur aux infractions de trafic d'influence actif et passif, de corruption active et passive et de recel desdits délits.
Ces différentes informations judiciaires ouvertes en 2017 faisaient l'objet d'une jonction sous le numéro CAB3 2017/25 ;
Le 6 novembre 2018, M. H. était entendu à Nice sur commission rogatoire internationale par les fonctionnaires de l'Inspection générale de la Police Nationale française, sous le régime de la garde à vue.
Il était inculpé le 8 novembre 2018 par le juge d'instruction de Monaco des chefs de trafic d'influence passif, corruption passive et violation du secret professionnel de l'enquête et/ou de l'instruction, et placé sous contrôle judiciaire.
Par requête déposée le 5 mars 2019, suivie d'un mémoire récapitulatif en date du 18 décembre 2019, le conseil de c. H. saisissait la chambre du conseil de la cour d'appel siégeant comme juridiction d'instruction d'une demande tendant à voir :
- déclarer sa requête recevable et fondée,
- prononcer la nullité de la procédure de garde à vue mise en œuvre en France les 6 et 7 novembre 2018 à l'encontre de M. H. au mépris des garanties prévues par la loi monégasque, notamment en ce qui concerne la motivation de la prolongation de garde à vue ou l'enregistrement de l'audition,
- ordonner la cancellation des cotes y afférentes qui ont été versées au dossier en vertu du procès-verbal coté D2889 du 7 novembre 2018,
- prononcer la nullité de l'inculpation de M. H. intervenue tardivement et en vertu d'un détournement de procédure consistant à verser au dossier des éléments recueillis dans un autre dossier par le magistrat instructeur en fraude du principe de saisine in rem,
- ordonner la cancellation de toutes les auditions de M. H. en qualité de témoin versées au dossier comme provenant de la procédure CAB2 2015/20,
- prononcer la nullité de l'acte d'inculpation du chef de violation du secret pour défaut de base légale et annuler tous les actes qui y sont associés, à savoir toutes les auditions en lien avec l'infraction visée, et notamment le procès-verbal de première comparution du 8 novembre 2018 (D2895) ainsi que l'inculpation qui en résulte,
- prononcer plus généralement la nullité de l'acte d'inculpation pour défaut de base légale, pour n'avoir imputé aucun fait à l'encontre de la personne de M. H.
- ordonner en conséquence la nullité du procès-verbal de première comparution et son retrait du dossier, avec toutes conséquences de droit,
- ordonner en outre la nullité du procès-verbal de notification des mesures de contrôle judiciaire, comme conséquence de la nullité qui précède,
- statuer sur les suites de la procédure avec toutes conséquences de droit.
Par mémoire déposé le 25 avril 2019, Mme R. demandait à la chambre du conseil d'une part de se déclarer incompétente pour se prononcer sur la régularité des actes de procédure exécutés sur le territoire français (garde à vue de M. H., d'autre part de dire mal fondés les autres moyens soulevés par l'inculpé et, en conséquence, de rejeter l'ensemble des demandes d'annulation formées par ce dernier et de le condamner aux dépens.
Par mémoire déposé le 10 mai 2019, M. B. présentait les mêmes demandes.
Par réquisitions du 28 mai 2019, le procureur général requérait de la chambre du conseil qu'elle :
- déclare la requête recevable,
- dise que la délivrance par le juge d'instruction d'une demande d'entraide pénale internationale aux autorités françaises était justifiée,
- se déclare incompétente pour statuer sur la régularité de la garde à vue dont a fait l'objet M. H.
- dise que son inculpation le 8 novembre 2018 n'est pas tardive,
- dise, en revanche, qu'elle n'est pas régulière au regard des dispositions de l'
article 166 du Code de procédure pénale
,
- en conséquence, prononce la nullité du procès-verbal du 8 novembre 2018 coté D2895,
- dise que ce procès-verbal devra être retiré du dossier, par application de l'
article 211 du Code de procédure pénale
,
Par arrêt n° R. 3845 du 28 mai 2020, la chambre du conseil de la cour d'appel a :
- reçu la requête en nullité déposée le 5 mars 2019 par M. H.
- s'est déclarée compétente pour statuer sur la régularité des modalités de la garde à vue en France de M. H.
- débouté le requérant de la demande de nullité de la garde à vue dont il a fait l'objet les 6 et 7 novembre 2018 en France,
- dit n'y avoir lieu à cancellation,
- débouté le requérant de sa demande de nullité du procès-verbal de sa première comparution,
- dit n'y avoir lieu à cancellation des auditions de M. H. en qualité de témoin provenant de l'information n° 2015/20,
- dit n'y avoir lieu de procéder au retrait de la procédure des actes précités,
- débouté le requérant de sa demande de nullité de la mesure de contrôle judiciaire prise à son encontre,
- laissé les frais de son arrêt à la charge de M. H.
Joignant, en raison de leur connexité, les pourvois n°2020-50 formé par le procureur général et n° 2020-58 formé par M. H. la Cour de révision, par arrêt du 11 janvier 2021, retenant sur le premier moyen du pourvoi formé par M. H. que les mentions de l'arrêt critiqué ne lui permettaient pas de s'assurer que la personne inculpée ou son conseil avait eu la parole le dernier a, au visa de l'
article 236 du Code de procédure pénale
, ensemble les principes généraux du droit, cassé et annulé cet arrêt en toutes ses dispositions, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens du pourvoi.
Elle a, en conséquence, renvoyé la cause et les parties à la prochaine session utile de la Cour de révision autrement composée.
M. H. n'ayant pas déposé de nouvelles conclusions après cassation, il y a lieu de statuer sur celles déposées par son conseil le 5 mars et le 18 décembre 2019 devant la chambre de conseil de la cour d'appel ci-dessus rappelées.
Par réquisitions après cassation du 1er juin 2021, le Procureur général requiert de la Cour de renvoi qu'elle :
- déclare la requête recevable,
- dise que la délivrance par le juge d'instruction d'une demande d'entraide pénale internationale aux autorités françaises était justifiée,
- se déclare incompétente pour statuer sur la régularité de la garde à vue dont a fait l'objet M. H. au regard de la législation française,
- se déclare compétente pour vérifier si les standards de l'ordre public juridique monégasque n'ont pas été méconnus,
- constate que le déroulement de la garde à vue n'a pas violé les droits de la défense du requérant,
- le déboute en conséquence de sa demande tendant à la nullité de la mesure de garde à vue effectuée en France,
- dise que son inculpation du 8 novembre 2019 n'est pas tardive,
- donne acte au Ministère public de ce qu'il déclare s'en rapporter à justice sur le mérite de la demande de nullité de l'inculpation pour violation des dispositions de l'
article 166 du code de procédure pénale
.
Par mémoire du 4 juin 2021, Mme R. partie civile, soutient qu'il résulte de l'
ordonnance n° 1.828 du 18 septembre 2008
rendant exécutoire la Convention d'entraide judiciaire franco-monégasque en matière pénale ainsi que des
articles 166, 203 et 205 du Code de procédure pénale
que la Cour de révision n'est pas compétente pour se prononcer sur la régularité d'actes de procédure exécutés sur le territoire français, en l'espèce la mesure de garde à vue prise à l'encontre de M. H. le 6 novembre 2018 ; qu'elle demande en conséquence à la Cour de se déclarer incompétente pour se prononcer sur la régularité des actes de procédure exécutés à cette occasion.
Mme R. soutient par ailleurs que tous les autres moyens présentés par M. H. aux termes de sa requête du 5 mars 2019 ne sont pas fondés.
Elle sollicite en conséquence le rejet de l'ensemble des demandes d'annulation formulées par celui-ci ainsi que sa condamnation aux dépens.
Par mémoire du 4 juin 2021, M. B. autre partie civile, demande à la Cour de renvoi après cassation de se déclarer incompétente pour se prononcer sur la régularité de la garde à vue de M. H. de déclarer le surplus de ses demandes mal fondées et, en conséquence, de rejeter l'ensemble des moyens d'annulation soulevés par ce dernier et de le débouter de ses demandes.
SUR CE :
Attendu que l'arrêt rendu le 28 mai 2020 par la chambre du conseil de la cour d'appel statuant comme juridiction d'instruction ayant été cassé en toutes ses dispositions, il y a lieu pour la cour de renvoi de se prononcer sur les prétentions émises par le Ministère public et par M. H. ; que ce dernier n'ayant pas déposé de nouveau mémoire après l'arrêt de cassation du 11 janvier 2021, il y a lieu de statuer au vu de sa requête du 5 mars 2019 ainsi que de son mémoire récapitulatif du 18 décembre 2019 ;
Attendu que par cette requête aux fins d'annulation d'actes de procédure, laquelle, conforme aux dispositions de l'
article 209 du code de procédure pénale
, est régulière et recevable, M. H. par l'intermédiaire de son conseil, expose à titre principal, d'une part que les juridictions françaises ne pouvaient pas l'interroger sur le fond, d'autre part que l'ensemble de la procédure est nulle dans la mesure où il a d'abord été entendu comme témoin dans une procédure à laquelle il n'avait pas accès sans bénéficier des garanties prévues par la loi en cas de mise en accusation ;
Qu'il soutient à titre subsidiaire qu'aucun des éléments des prétendues infractions n'est démontré et que, par conséquent, l'inculpation ne reposant sur aucun chef, il convient d'en prononcer l'annulation ;
Que ces différentes critiques :
- I/ l'incompétence territoriale des juridictions françaises,
- II/ la nullité au vu de l'inculpation tardive en violation de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après CESDH) et sur la base d'un détournement de procédure,
- III/ la critique de l'acte d'inculpation,
seront successivement examinées :
I/ Sur l'incompétence territoriale des juridictions françaises
Attendu que M. H. invoquant l'
article 203 du Code de procédure pénale
, qui dispose que lorsqu'il est nécessaire de faire procéder à des actes d'information dans un pays étranger, le juge d'instruction peut recourir à une commission rogatoire internationale (ci- après CRI), soutient qu'en l'espèce aucune nécessité ne justifiait la délégation à des policiers étrangers de son audition sur le fond, au demeurant non motivée, sauf à contourner la législation monégasque ; qu'il en déduit que les procès- verbaux de son audition sous le régime de la garde à vue organisée en France sont nuls ;
Qu'il ajoute que les droits accordés à une personne gardée à vue dans le cadre d'une commission rogatoire sont plus protecteurs à Monaco qu'en France, le droit monégasque ayant consacré l'enregistrement vidéo d'une audition en garde à vue ainsi que la motivation obligatoire par le juge d'instruction de la mesure de prolongation devant le juge des libertés ;
Qu'il précise qu'en l'espèce, la prolongation de sa garde à vue a été autorisée par le juge d'instruction français, sans présentation du gardé à vue et sans entretien, dans des conditions non conformes à l'article 19 de la Constitution monégasque, au motif que la visioconférence de l'antenne niçoise de l'IGPN (l'inspection générale de la police nationale) était en panne ;
Attendu cependant que la CRI délivrée par le magistrat instructeur monégasque aux autorités judiciaires françaises compétentes, sur le fondement de la Convention d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, de la Convention d'entraide judiciaire en matière pénale franco-monégasque du 8 novembre 2005 et des
articles 203 et suivants du Code de procédure pénale
afin de faire procéder, dans le cadre d'un statut protecteur de ses droits, conformément à la législation en vigueur en France, à l'audition de M. H. ainsi qu'à une perquisition à son domicile et dans le ou les véhicules lui appartenant ou utilisés par lui, notamment pour rechercher son « journal de bord », se justifie par la situation de son domicile situé en France, peu important à cet égard que les faits reprochés au requérant auraient été commis sur le territoire de la Principauté ; qu'en effet, les autorités judiciaires françaises n'ont agi en l'espèce que comme délégataires du magistrat mandant pour l'accomplissement des actes sollicités ;
Que de plus le magistrat instructeur peut, en application des dispositions de l'
article 87 du Code de procédure pénale
, prendre toutes les mesures qu'il estime utile à la manifestation de la vérité sans avoir à motiver la nécessité de recourir à un pays étranger ;
Qu'il ne peut, par suite, être reproché à ce magistrat d'avoir contourné la législation monégasque ni violé les règles de compétence ; que la demande de nullité sera dès lors écartée de ce chef ;
Attendu par ailleurs, que si la juridiction monégasque n'est pas compétente pour se prononcer sur la régularité de la garde à vue de M. H. au regard de la loi française comme le soutiennent exactement Mme R. M. B. ainsi que le ministère public, ce dernier fait observer à juste titre qu'il appartient à la chambre du conseil d'apprécier cette régularité au regard des droits de la défense et des principes généraux du droit comme cela lui est demandé par M. H. ;
Qu'à cet égard, le dossier de la procédure permet à la cour de renvoi de s'assurer que ce dernier s'est vu notifier, dès son placement en garde à vue, toutes les mesures protectrices des droits de la défense tels que déterminées par les standards monégasques et internationaux et spécialement par l'article 6 de la CESDH ; que lui ont été notifiés notamment les faits pour lesquels il était placé en garde à vue, le droit de garder le silence, d'être assisté d'un avocat, de prévenir un membre de sa famille et d'être examiné par un médecin ;
Attendu que M. H. conteste enfin les conditions de prolongation de sa garde à vue ainsi que l'absence d'enregistrement audiovisuel de celle-ci ;
Attendu, sur le premier point, que les conditions dans lesquelles la prolongation de sa garde à vue a été ordonnée ne portent pas atteinte aux droits de la défense et ne violent pas l'article 19 de la Constitution monégasque dès lors que cette décision, qui est motivée et soumise à un contrôle juridictionnel, a été prise en toute indépendance par un magistrat du siège habilité à cette fin et que la présentation préalable du gardé à vue à ce magistrat n'a pu être effectuée en raison de l'éloignement géographique du juge d'instruction parisien chargé de ce contrôle, compétent par rapport au lieu de la garde à vue ;
Que, sur le second point, le fait que la garde à vue de M. H. n'ait pas fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel en raison de circonstances exceptionnelles provenant du dysfonctionnement du système de visioconférence des services locaux de police n'est contraire ni aux principes généraux du droit, ni au respect des droits de la défense dès lors que M. H. a été assisté de son conseil au cours de sa garde à vue et que ce dernier n'a émis de critique ni sur le comportement des enquêteurs au cours de cette garde à vue, ni sur l'exactitude de la retranscription des interrogatoires et ne fait état d'aucune contestation de ce chef dans le mémoire déposé à l'appui de sa requête ;
Attendu dès lors que la demande de nullité de la garde à vue de M. H. et de sa prolongation sera rejetée ;
II/ Sur la nullité au vu de l'inculpation tardive de M. H. en violation de la CESDH et sur la base d'un détournement de procédure
Attendu que le requérant expose qu'il a d'abord été entendu par le magistrat instructeur sur les mêmes faits à trois reprises en qualité de témoin, uniquement à charge, dans le dossier suivi du chef d'atteinte à la vie privée de Mme R. (CAB2 2015/20) dossier auquel il n'a pas eu accès et pour lequel il n'a pu bénéficier de l'assistance d'un avocat pendant ses auditions et que celles-ci, versées par le magistrat instructeur au dossier dans lequel il a été inculpé de trafic d'influence ont été utilisées contre lui en violation de la CESDH et sur la base d'un détournement de procédure ;
Qu'il considère que ce magistrat a mené, dans le dossier suivi du chef d'atteinte à la vie privée de Mme R. des investigations qui portent en réalité sur le trafic d'influence qui lui est reproché, ce depuis le mois de janvier 2017, en dehors de toute saisine par le Parquet général de Monaco, et sollicite que cette inculpation tardive fasse l'objet d'une annulation pour violation des droits de la défense ;
Qu'il sollicite également que soient écartés du dossier tous les éléments qui y ont été versés par le magistrat instructeur, provenant du dossier suivi du chef d'atteinte à la vie privée, lesquels ont été recueillis dans le cadre d'actes et d'auditions qui excédaient manifestement sa saisine ;
Mais attendu qu'aucune disposition légale n'interdit au juge d'instruction qui, aux termes de l'
article 87 du Code de procédure pénale
prend toutes les mesures qu'il estime utile à la manifestation de la vérité, lorsqu'il est chargé de deux informations distinctes, de joindre à l'une des procédures des éléments provenant de l'autre, dont la production est de nature à contribuer à la manifestation de la vérité, dans la mesure où, comme c'est le cas en l'espèce, ces éléments sont soumis à la discussion des parties ;
Que M. H. ne démontre pas, comme il le prétend, que les trois auditions en cause ont le caractère d'auditions à charge, ou qu'elles ont été conduites avec une « stratégie déloyale et illégale conduisant notamment aux inculpations de novembre 2018 » relatives au trafic d'influence invoqué par M. B. ;
Que si, lors de ses auditions, M. H. a été entendu seul, sans l'assistance d'un avocat et sous serment, cette circonstance ne résulte que de son statut de témoin déterminé par les
articles 125 et suivants du Code de procédure pénale
et non d'une violation des droits de la défense ;
Attendu par ailleurs que saisi de l'information ouverte sur la plainte avec constitution de partie civile de Mme R. pour atteinte à la vie privée, complicité et recel, plainte dans laquelle celle-ci dénonçait tant des faits de violation de sa vie privée relatifs à l'enregistrement à son insu de paroles prononcées le 23 février 2015 au domicile de M. R. que l'utilisation de cet enregistrement à l'occasion d'une autre information, ouverte le 24 février 2015 sous le numéro CAB1 2015/04, la mettant en cause ainsi que M. B. il appartenait au magistrat instructeur, pour les besoins de son information, sans dépasser sa saisine, de déterminer les relations entretenues par Mme B. avec les personnes ayant pu participer aux infractions dénoncées par la plaignante et, en particulier de déterminer quelles personnalités monégasques ayant autorité en matière judiciaire auraient pu, comme Mme B. le prétend, lui donner des assurances sur la licéité de cet enregistrement ;
Que c'est dans le cadre de ces investigations que M. H. a été entendu à trois reprises en qualité de témoin par le magistrat instructeur sans pour autant qu'il résulte de ces auditions un détournement de procédure qui l'aurait conduit à s'incriminer lui-même ;
Attendu en conséquence que M. H. qui ne justifie ni d'un dépassement de sa saisine par le magistrat instructeur, ni d'un détournement de procédure, sera débouté de sa demande de nullité de ce chef et de cancellation de ses auditions en qualité de témoin issues de la procédure CAB2 2015/20 ;
Attendu de plus que le requérant ne peut prétendre avoir été entendu à plusieurs reprises en qualité de témoin dans une information ouverte des chefs d'atteinte à la vie privée, complicité et recel sans avoir été immédiatement inculpé dès lors que les chefs de son inculpation du 8 novembre 2018 pour trafic d'influence passif, corruption passive et violation du secret de l'instruction, intervenue dans une information judiciaire distincte (CAB3 2017/25) ne sont pas de même nature et sont étrangers à ceux faisant l'objet de l'information ouverte pour atteinte à la vie privée dans laquelle il a été entendu comme témoin ;
Que le grief d'inculpation tardive sera en conséquence écarté ;
III/ Sur la critique de l'acte d'inculpation
Attendu que M. H. soutient que son inculpation du chef de violation du secret professionnel de l'enquête et/ou de l'instruction doit être annulée comme ne reposant sur aucune base légale dès lors qu'aucune des réquisitions visées dans l'acte d'inculpation ne fait mention de cette infraction ;
Qu'il précise que ce chef d'inculpation a été notifié au visa des
articles 26, 27, 31 et 308 du Code pénal
alors que « cet article » du Code pénal ne traite pas de l'infraction visée ce qui rend nul « l'acte sur la base duquel il est inculpé ainsi que tous les actes qui y sont associés à savoir toutes les auditions en lien avec l'infraction visée ainsi que l'inculpation qui en résulte » ;
Attendu que M. H. prétend par ailleurs que son inculpation vise des infractions de corruption passive et de trafic d'influence passif définis respectivement par les
articles 113-2 et 113-3 du Code pénal
, mais ne fait référence à aucun fait, contrairement aux dispositions des
articles 166 du Code de procédure pénale
et en violation des articles 5-§2 et 6-§3 de la CESDH et que cette carence rend nul l'acte d'inculpation ;
1/ Sur la nullité de l'inculpation du chef de violation du secret professionnel, de l'enquête et/ou de l'instruction pour défaut de base légale
Attendu que M. H. omet de mentionner que le juge d'instruction a, par
ordonnance du 23 octobre 2017
, joint les informations instruites à son cabinet sous les numéros CAB 3-2017/25 et CAB3 2017-26, et dit qu'elles seraient désormais instruites sous la seule référence CAB3 2017/25 ;
Que l'information portant initialement le numéro 2017/26 avait été ouverte sur plainte avec constitution de partie civile de Mme R. déposée le 26 septembre 2017, par un réquisitoire introductif du 9 octobre 2017 visant notamment les délits de violation du secret de l'enquête et du secret de l'instruction et complicité et de recel de ces mêmes délits ;
Que dès lors, le magistrat instructeur étant saisi de ces infractions par ce réquisitoire lorsqu'il en a, le 8 novembre 2018, inculpé M. H. le moyen manque en fait ;
Attendu par ailleurs que c'est par suite d'une erreur de plume qui n'est pas de nature à entraîner la nullité de l'inculpation de M. H. que le procès-verbal de sa première comparution vise l'
article 31 du Code pénal
, totalement étranger aux délits dont il est inculpé et non l'
article 31 du Code de procédure pénale
, le contenu des autres articles du Code pénal et spécialement de l'
article 308 du Code pénal
auquel ce procès-verbal se réfère, ne pouvant laisser aucun doute sur le délit poursuivi de violation du secret de l'enquête et/ou de l'instruction ainsi que sur les sanctions encourues de ce chef ;
2/ Sur la nullité de l'inculpation pour absence de notification des faits reprochés dans le procès-verbal de première comparution
Attendu que M. H. invoque la nullité du procès-verbal de première comparution au regard de l'
article 166 du Code de procédure pénale
, 5§2 et 6 §3 de la CESDH ;
Attendu, selon les dispositions du premier alinéa de l'
article 166 du Code de procédure pénale
, que, lors de la première comparution, le juge d'instruction constate l'identité de l'inculpé, lui fait connaître les faits qui lui sont imputés et reçoit ses déclarations après l'avoir averti qu'il est libre de ne pas en faire ; qu'il se déduit du deuxième alinéa de ce texte que seule la mention de cet avertissement est prescrite à peine de nullité, à l'exclusion par conséquent de la notification des faits ; qu'il résulte des dispositions de l'article 207 du même code qu'en dehors des cas de nullité expressément prévus par la loi, il y a également nullité en cas de violation des dispositions substantielles, notamment celles qui garantissent les droits de la défense, de telle sorte que leur violation entraîne, si elle est établie, l'annulation de l'acte qui la comporte ;
Que ce procès-verbal de première comparution de M. H. en date du 8 novembre 2018 porte les mentions suivantes :
L'avis ayant été préalablement notifié au susnommé, conformément aux prescriptions de l'
article 166 du Code de procédure pénale
, qu'il est libre de s'abstenir de toute déclaration hors la présence d'un défenseur, Nous lui faisons connaître qu'en application du réquisitoire introductif de monsieur le Procureur général en date du 19 septembre 2017 (D12), de la plainte avec constitution de partie civile du 25 septembre 2017 de Madame t. R. née B. déposée le 26 septembre 2017 par Maîtres Pierre DE PINGON, Denis FAYOLLE et c. BALLERIO (D112-D27, D34- Ordonnance de jonction du 23 octobre 2017), de la plainte avec constitution de partie civile du 25 octobre 2017 de Monsieur y. B. déposée le même jour par Maîtres Frank MICHEL et Charles LECUYER (D281-D8, D14- ordonnance de jonction du 21 décembre 2017) et des réquisitions supplétives délivrées par Monsieur le Procureur général les 11 décembre 2017(D238, D239) et 28 juin 2018 (D2234, D2235), il est inculpé des chefs suivants :
1- trafic d'influence passif, commis à Monaco courant 2015, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription de l'action publique, délits prévus et réprimés par les
articles 26, 27, 113, 113-3, 119, 122, 122-1 et 122-2 du Code pénal
;
2- corruption passive, commise à Monaco, de courant 2015 jusqu'à courant 2017, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription de l'action publique, délits prévus et réprimés par les articles 26, 27, 113, 113-2 , 122, 122-1 et 122-2 du Code pénal ;
3- violation du secret professionnel de l'enquête et/ou de l'instruction, commise à Monaco courant 2015, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription de l'action publique, délits prévus et réprimés par les
articles 26, 27, 31 et 308 du Code pénal
» ;
L'inculpé a déclaré : « Je prends acte de l'inculpation que vous me notifiez et je m'expliquerai ultérieurement en présence de mon conseil » ;
Qu'après avoir désigné son conseil, l'inculpé a souhaité faire au magistrat instructeur la déclaration suivante :
Cette inculpation ne repose sur aucun fait réel ou sérieux, ne résulte que de votre interprétation suggestive et irrationnelle des faits de ce dossier. Cela démontre une nouvelle fois la grande partialité que vous exprimez à mon égard. La situation que vous engendrez ainsi prend le caractère d'un scandale judiciaire dont vous devrez personnellement assumer la responsabilité » ;
Attendu qu'outre qu'il est ainsi fait mention de certains éléments de fait, à savoir la date et le lieu de ces infractions ainsi que du nom de la victime, M. H. ne rapporte pas la preuve qu'il ait été porté atteinte à ses droits, dès lors qu'il n'a fait aucune déclaration au cours de sa première comparution si ce n'est une déclaration de principe d'ordre général qui n'est pas de nature à l'incriminer et que, lors de sa garde à vue au cours de laquelle il a été interrogé en détail sur les faits pouvant lui être imputés, ainsi qu'à l'occasion des actes d'instruction qui ont suivi son inculpation, il a été assisté par un avocat avec lequel il a pu librement s'entretenir et qui a eu accès au dossier de l'information conformément à la loi ;
Que dès lors, la demande de nullité du procès-verbal de première comparution sollicitée par M. H. sera rejetée ;
Attendu que les frais du présent arrêt seront laissés à la charge du requérant ;
Déclare recevable la requête en nullité déposée le 5 mars 2019 par M. c. H.
Se déclare incompétente pour statuer sur la régularité de garde à vue, dont a fait l'objet M. c. H. au regard de la législation française et se déclare compétente pour vérifier si les standards de l'ordre public juridique monégasques ont été méconnus,
Laisse les frais du présent arrêt à la charge de Monsieur c. H.