Cour de révision
Monaco
20 octobre 2016
La Société dénommée CRESTA OVERSEAS LIMITED
c/ la Société Anonyme de droit Britannique dénommée BARCLAYS BANK PLC
Contentieux Judiciaire
Abstract
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Saisie immobilière - Titre exécutoire – Irrégularité – Commandement –Opposition – Incident - Revirement de jurisprudence - Application immédiate –Effets - Accès au juge - Convention européenne des Droits de l'Homme – Violation – non |
Résumé
Dans le Code de procédure civile, la procédure de saisie immobilière est régie par les articles 572 à 684. En retenant qu'en toute hypothèse, l'opposition au commandement aux fins de saisie immobilière en vue d'obtenir son annulation pour irrégularité du titre exécutoire est une contestation née de la procédure de saisie, de nature à exercer une influence sur celle-ci et s'y référant directement, en sorte qu'elle constitue un incident de saisie, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision.
Répondant au grief tiré de l'application immédiate, à l'occasion d'un revirement de jurisprudence, d'une règle d'irrecevabilité, dans une instance en cours, qui priverait le demandeur d'un procès équitable, en lui interdisant l'accès au juge en ce que l'application immédiate, à l'occasion d'un revirement de jurisprudence, au commandement de payer litigieux du régime procédural spécifique aux incidents de saisie, prive la société CRESTA OVERSEAS LIMITED de l'effectivité de son recours et constitue une violation des articles 6§1 et 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, la cour de révision juge que toute juridiction peut changer de point de vue sur la réponse à donner à une question de droit et rejette le pourvoi.
(en session civile)
La Cour,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Attendu, selon l'arrêt critiqué, que la société BARCLAYS BANK PLC a consenti des prêts à la société CRESTA OVERSEAS LIMITED ; que, n'étant pas remboursée à l'échéance, elle a, le 30 janvier 2015, fait signifier à celle-ci un commandement de payer valant saisie immobilière ; que, par exploit délivré le 3 mars 2015, la société CRESTA OVERSEAS LIMITED a fait assigner la société BARCLYS BANK PLC devant le Tribunal de première instance en vue de voir, à titre principal, prononcer la nullité du commandement aux fins de saisie immobilière ;que, par jugement R.5769 rendu le 28 mai 2015, le Tribunal a débouté la société CRESTA OVERSEAS LIMITED et ordonné l'exécution provisoire de sa décision ; que par exploit d'appel parte in qua et assignation, cette société a relevé appel de cette décision ;que, par arrêt du 16 février 2016, la Cour d'appel a déclaré cet appel irrecevable, comme tardif, sur le fondement de l'
article 655 ter du Code de procédure civile
;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu que la société CRESTA OVERSEAS LIMITED reproche à la Cour d'appel une violation des
articles 424, 578, 642, 655 bis et 655 ter du Code de procédure civile
, un défaut de motifs et un manque de base légale, en ce qu'elle a déclaré son appel irrecevable comme tardif, alors, selon le pourvoi, de première part que le commandement de payer constitue un acte préalable à la saisie immobilière ; que l'opposition à ce commandement ne constitue pas un incident de saisie mais un contentieux autonome, relevant du droit commun des voies de recours ; qu'en retenant, pour dire que l'appel du jugement sur l'opposition au commandement afin de saisie, formé dans le délai de droit commun, était tardif, qu'il s'agissait d'une demande incidente à une poursuite de saisie immobilière, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ; alors, de seconde part, que l'application immédiate, à l'occasion d'un revirement de jurisprudence, d'une règle d'irrecevabilité, dans une instance en cours, prive le demandeur d'un procès équitable, en lui interdisant l'accès au juge ; que l'application immédiate, à l'occasion d'un revirement de jurisprudence, au commandement de payer litigieux du régime procédural spécifique aux incidents de saisie, prive la société CRESTA OVERSEAS LIMITED de l'effectivité de son recours et constitue une violation des articles 6§1 et 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme ;
Mais attendu, de première part, que, dans le Code de procédure civile, la procédure de saisie immobilière est régie par les articles 572 à 684 ; qu'en retenant qu'en toute hypothèse, l'opposition au commandement aux fins de saisie immobilière en vue d'obtenir son annulation pour irrégularité du titre exécutoire est une contestation née de la procédure de saisie, de nature à exercer une influence sur celle-ci et s'y référant directement, en sorte qu'elle constitue un incident de saisie, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé en sa première branche ;
Et attendu, de deuxième part, que toute juridiction peut changer de point de vue sur la réponse à donner à une question de droit ; que le moyen ne peut être accueilli en sa seconde branche ;
Sur la demande de dommages et intérêts
Attendu que la défenderesse au pourvoi demande que la société CRESTA OVERSEAS LIMITED soit condamnée à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de procédure ;
Mais attendu que la société CRESTA OVERSEAS LIMITED n'a fait qu'user normalement d'une voie de recours prévue par la loi ; qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la demande indemnitaire formée contre elle ;
PAR CES MOTIFS,
Rejette le pourvoi ;
Rejette la demande de dommages et intérêts présentée par la société BARCLAYS BANK PLC ;
Condamne la société CRESTA OVERSEAS LIMITED aux dépens de la présente instance, dont distraction au profit de maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
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