Cour de révision
Monaco
16 mai 2019
Messieurs i. S I., a. I et d. I. en présence du Ministère public
Contentieux Judiciaire
Abstract
|
|
|
|
|
|
|
|
Instruction - Saisie - Manifestation de la vérité - Complexité de l'affaire - Délai raisonnable |
Résumé
Saisi d'une information judiciaire ouverte notamment du chef de blanchiment, le juge d'instruction a fait procéder, courant mars 2015, au blocage des comptes ouverts au nom d i. S. a.I. et d. I. dans les établissements monégasques de la COMPAGNIE MONÉGASQUE DE BANQUE(CMB), de la BANQUE POPULARE DI SANDRIO de Monaco (BPS) et de l'EFG Bank Monaco, ainsi qu'au blocage, auprès du service des hypothèques, des biens immobiliers appartenant à la SCI ARJE, à la SCI WIMILLE, et à la SCP MARESOL DUE 2004, dans lesquelles les inculpés ont des intérêts ; Mme S. M. I.et Mme I. ont demandé la mainlevée des mesures de blocage qui frappent leurs actifs mobiliers et immobiliers ; par
ordonnance du 13 décembre 2018
, confirmée par arrêt de la cour d'appel en date du 8 février 2019, leur requête a été rejetée.
Mme S. M. I.et Mme I. font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes alors, selon le moyen d'une part « que les mesures de séquestre doivent être nécessaires à la manifestation de la vérité, ce qui n'est pas démontré dès lors que l'origine et la destination des fonds crédités sur les comptes bloqués des requérants sont connues, et les mesures ordonnées portent atteinte gravement à leur droit de propriété et sont illégitimes ; qu'en outre, elles excèdent le délai raisonnable prescrit en matière d'accusation pénale par l'article 6§1 de la CESDH puisque la mesure de blocage dure depuis plus de quatre ans ; que d'ailleurs cette affaire ne relève pas d'une complexité particulière et les consorts I. ne sont à l'origine, par leur comportement, d'aucun retard, le déroulé chronologique des opérations d'instruction faisant apparaître des périodes de stagnation ; qu'enfin la mainlevée n'est pas susceptible de mettre en péril des investigations à venir, ni d'entraîner un risque de déperdition des preuves » et d'autre part « qu'en l'espèce, la mesure de blocage a été exécutée le 10 mars 2015 et s'est poursuivie depuis cette date nonobstant les multiples demandes de mainlevée formées par les requérants alors que les dispositions de l'article 6§1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme reconnaissent à toute personne poursuivie au plan pénal le droit d'obtenir dans un délai raisonnable une décision définitive sur le bien-fondé de l'accusation dirigée contre elle ; que le caractère raisonnable de la durée d'une procédure s'apprécie notamment au regard de la complexité de l'affaire, du comportement des autorités judiciaires poursuivantes et de l'attitude adoptée par le mis en cause ; et qu'en l'espèce la complexité de l'affaire résulte en effet de la multiplicité des infractions poursuivies et de la dimension internationale des investigations ordonnées, mais il est constant que l'instruction n'a pas abouti pour l'heure à la comparution des inculpés devant une juridiction de jugement alors qu'une période de quatre ans s'est écoulée depuis le blocage pratiqué sur leurs comptes bancaires ainsi que sur leurs actifs immobiliers ».
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que les multiples structures et les différents circuits financiers empruntés avaient eu pour conséquence d'opacifier les mécanismes bancaires utilisés et d'atténuer les liens entre les donneurs d'ordre, les destinataires finaux et les bénéficiaires réels, tandis que l'absence de coopération effective des inculpés en vue de permettre la consultation des relevés de comptes étrangers sur lesquels les fonds avaient transité rendaient nécessaires des investigations complémentaires, et, par motifs propres, que si la saisie des comptes bancaires et des biens immobiliers avait été ordonnée depuis près de quatre années, l'information judiciaire ouverte s'avérait être d'une grande complexité tant en raison de la nature des infractions poursuivies que de la dimension internationale des investigations et de l'inertie de l'une des personnes inculpées, alors que l'instruction devait se poursuivre à la suite du retour récent des éléments recueillis dans le cadre d'une commission rogatoire, la cour d'appel a pu retenir d'une part que le maintien des saisies était utile à la manifestation de la vérité et d'autre part, qu'au regard de la complexité de l'affaire, le délai écoulé depuis que celles-ci avaient été opérées ne méconnaissait pas la disposition conventionnelle invoquée.
Hors session pénale
Chambre de conseil – Instruction
La Cour,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Attendu, selon l'arrêt critiqué, que, saisi d'une information judiciaire ouverte notamment du chef de blanchiment, le juge d'instruction a fait procéder, courant mars 2015, au blocage des comptes ouverts au nom d i. S. a.I.et d. I. dans les établissements monégasques de la COMPAGNIE MONÉGASQUE DE BANQUE (CMB), de la BANQUE POPULARE DI SANDRIO de Monaco (BPS) et de l'EFG Bank Monaco, ainsi qu'au blocage, auprès du service des hypothèques, des biens immobiliers appartenant à la SCI ARJE, à la SCI WIMILLE, et à la SCP MARESOL DUE 2004, dans lesquelles les inculpés ont des intérêts ; que Mme S. M. I.et Mme I. ont demandé la mainlevée des mesures de blocage qui frappent leurs actifs mobiliers et immobiliers ; que par
ordonnance du 13 décembre 2018
, confirmée par arrêt de la cour d'appel en date du 8 février 2019, leur requête a été rejetée ; que les trois inculpés ont formé un pourvoi en révision ;
Sur le moyen unique du pourvoi
Attendu que Mme S. M. I.et Mme I. font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes alors, selon le moyen d'une part « que les mesures de séquestre doivent être nécessaires à la manifestation de la vérité, ce qui n'est pas démontré dès lors que l'origine et la destination des fonds crédités sur les comptes bloqués des requérants sont connues, et les mesures ordonnées portent atteinte gravement à leur droit de propriété et sont illégitimes ; qu'en outre, elles excèdent le délai raisonnable prescrit en matière d'accusation pénale par l'article 6§1 de la CESDH puisque la mesure de blocage dure depuis plus de quatre ans ; que d'ailleurs cette affaire ne relève pas d'une complexité particulière et les consorts I.ne sont à l'origine, par leur comportement, d'aucun retard, le déroulé chronologique des opérations d'instruction faisant apparaître des périodes de stagnation ; qu'enfin la mainlevée n'est pas susceptible de mettre en péril des investigations à venir, ni d'entraîner un risque de déperdition des preuves » et d'autre part « qu'en l'espèce, la mesure de blocage a été exécutée le 10 mars 2015 et s'est poursuivie depuis cette date nonobstant les multiples demandes de mainlevée formées par les requérants alors que les dispositions de l'article 6§1 de la Convention européenne de Sauvegarde des droits de l'Homme reconnaissent à toute personne poursuivie au plan pénal le droit d'obtenir dans un délai raisonnable une décision définitive sur le bien-fondé de l'accusation dirigée contre elle ; que le caractère raisonnable de la durée d'une procédure s'apprécie notamment au regard de la complexité de l'affaire, du comportement des autorités judiciaires poursuivantes et de l'attitude adoptée par le mis en cause ; et qu'en l'espèce la complexité de l'affaire résulte en effet de la multiplicité des infractions poursuivies et de la dimension internationale des investigations ordonnées, mais il est constant que l'instruction n'a pas abouti pour l'heure à la comparution des inculpés devant une juridiction de jugement alors qu'une période de quatre ans s'est écoulée depuis le blocage pratiqué sur leurs comptes bancaires ainsi que sur leurs actifs immobiliers » ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que les multiples structures et les différents circuits financiers empruntés avaient eu pour conséquence d'opacifier les mécanismes bancaires utilisés et d'atténuer les liens entre les donneurs d'ordre, les destinataires finaux et les bénéficiaires réels, tandis que l'absence de coopération effective des inculpés en vue de permettre la consultation des relevés de comptes étrangers sur lesquels les fonds avaient transité rendaient nécessaires des investigations complémentaires, et, par motifs propres, que si la saisie des comptes bancaires et des biens immobiliers avait été ordonnée depuis près de quatre années, l'information judiciaire ouverte s'avérait être d'une grande complexité tant en raison de la nature des infractions poursuivies que de la dimension internationale des investigations et de l'inertie de l'une des personnes inculpées, alors que l'instruction devait se poursuivre à la suite du retour récent des éléments recueillis dans le cadre d'une commission rogatoire, la cour d'appel a pu retenir d'une part que le maintien des saisies était utile à la manifestation de la vérité et d'autre part, qu'au regard de la complexité de l'affaire, le délai écoulé depuis que celles-ci avaient été opérées ne méconnaissait pas la disposition conventionnelle invoquée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS,
Rejette le pourvoi ;
Condamne Mme i. S. M. a. I. et Mme d. I. aux entiers dépens.
Contentieux Judiciaire